-
R comme ROTH
Ce patronyme est présent 733 598 fois sur Geneanet ! Il est d’origine allemande ou alsacienne. Sobriquet désignant une personne au teint rougeaud ou aux cheveux roux (rot = rouge), il offre plusieurs variantes comme « Rothe » en Lorraine ou bien « Rothen » (génitif) en Suisse ou en Franche-Comté. Rencontré en Alsace, le diminutif de « Roth » est « Roeth » : c’est le surnom donné à un rouquin.
Mais il existe bien d’autres variantes, sinon, ce serait trop facile : Rod / Rodd / Roeth / Roht / Rohte / Rot / Rothen / et bien évidemment Rott.
Et bien retournons en Alsace ! Non pas à Oberhaslach, mais à Wasselonne, toujours dans le Bas-Rhin.
Je vais vous parler de ROTH Frédérique.
Frédérique est née le 16 février 1847 ; nous sommes en pleine Monarchie de Juillet, sous le règne de Louis-Philippe ; il sera par ailleurs le seul souverain à ne pas avoir engagé de guerre. Peut-on lui en vouloir….
Je suis une descendante à la 4e génération d'un cousin de son époux Ferdinand DEIBER.
Avant de rechercher les naissances de la famille ROTH, je regarde toujours les recensements des années précédent la naissance de Frédérique puis celles après sa naissance ; cette investigation me permet de visualiser la fratrie et la filiation.
Frédérique est la 9ème enfant d’une fratrie de 10 dont la plupart n’atteindra jamais l’âge adulte.
Et quelle ne fut pas ma surprise lorsque j’ai visualisé un grand « P » pour protestant….
Je n’ai aucune religion – exceptée celle de croire au genre humain – même si ma mère a bien essayé, en vain, de m’inculquer sa religion catholique.
Alors, c’est un peu étrange, d’autant plus que le mois dernier, lors des ateliers que j’anime à MNEMOSYNE, j’ai présenté la généalogie des protestants, affirmant que j’abordais ce sujet pour aider une adhérente, alors que je n’étais absolument pas concernée !
Ma « famille ordinaire » m’apportera toujours des surprises : n’est-ce pas aussi cela la généalogie?!
La question immédiate : comment deux personnes, Ferdinand catholique et Frédérique protestante, ont pu s’unir ? Est-ce possible ? Ils devaient « sacrément » s’aimer ces deux-là pour braver la loi des pères….
Wasselonne était le siège d’un consistoire de l’Église protestante de la Confession d'Augsbourg d'Alsace et de Lorraine, qui avait entre autre, la mission de contrôler les mœurs de ses administrés. En 1871, elle conservera son statut au sein du nouveau Reichsland ; la religion luthérienne tenait une place prépondérante dans le cœur des Allemands.
A la différence d’Oberhaslach, petit village de 1069 âmes en 1866, Wasselonne est une ville de 4308 habitants à la même date ; d’ailleurs, elle est reliée par le chemin de fer à Molsheim et Saverne. Et Ferdinand est employé des Chemins de Fer ; son activité l’a conduit dans cette commune et il y a rencontré Frédérique. Le désir du roi Louis-Philippe était de désenclaver la province ; Napoléon III poursuivra ce projet...
Ils se sont mariés le 23 février 1870, dans la ville natale de l’épouse. 1871 est une bien triste année, et pour bon nombre d’Alsaciens. Frédérique et Ferdinand auront leur 1er enfant : Marie Jeanne, qui décédera au bout de 4 mois de vie. Pas facile de voyager avec un bébé et de fuir les Allemands qui approchent à grands pas....
Après son mariage, le couple a opté pour la nationalité française ; il devait se rendre à Luneville en Meurthe-et-Moselle….
Il posera ses valises le temps d’avoir la petite Jeanne Alice en 1874 et poursuivra sa route jusqu’à Ludres, toujours dans les environs de Nancy ; Frédérique et Ferdinand auront une autre petite fille en 1877, Marie Lina. Elles seront les « rayons de soleil » de leurs parents ; les deux enfants seront institutrices, l’élite dans la société au 19ème siècle.
Quelle satisfaction pour ce couple ! Les grand-parents DEIBER étaient tailleurs de pierres et les aïeux ROTH étaient mégissiers-chamoiseurs ; que de chemins parcourus ! Des femmes libres et autonomes, sans être sous la tutelle de leur conjoint : c’est pas le bonheur ?
Le bonheur ? Ne nous emballons pas …..
En 1900, le taux illettrisme est encore de 4 % et petit à petit, la France marche vers la guerre.
« A quant la circulaire qui enlèvera aux instituteurs et institutrices la corvée – car pour la plupart c’est une corvée – de conduire les enfants à la messe et aux vêpres ». (Extrait de la presse locale de la Loire – 6 octobre 1900)
L’alphabétisation poursuite sa progression : en 1913, moins de 5 % des conscrits ne savent ni lire ni écrire ; 1,6 % des hommes ne savent pas signer leur acte de mariage contre 2,7 % pour les femmes.
Si les enfants de Frédérique et de Ferdinand ont acquises un certain savoir et une émancipation assumée, la première guerre mondiale ne les épargnera pas. Mais ni Ferdinand décédé en 1901, ni Frédérique morte en 1913, ne connaîtront les affres de nouvelles offensives allemandes.
Pour en savoir plus :
L’église protestante Saint Laurent
Articles du cercle d’Histoire de Wasselonne
Protestantisme entre modernité et traditions
Les mariages luthériens en Alsace du XVe au XIXe siècles
Journal d'un habitant de Nancy pendant l'invasion de 1870-1871 , par Louis Lacroix
Tags : frederique, roth, ferdinand
-
Commentaires