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La poussière des corons
1900, dans un petit village du Pas-de-Calais. Madeleine, fille d'une famille de mineurs, retrace son quotidien au cœur du coron où elle réside. La mort et la souffrance sont présents tout au long de son récit ; par moments, elle se croit enfin heureuse, mais la mine la rappelle toujours à son bon souvenir et lui apporte son lot de malheurs.
Dans un style clair mais émouvant, elle raconte ses angoisses et ses peurs ; tout commence lorsqu’elle voit son père pleurer lors de la catastrophe de 1906 ; « cette scène me fit prendre conscience que mon père, que je croyais fort et invulnérable, pouvait être aussi faible qu’un petit enfant. Cela éveilla en moi une insécurité, une méfiance vis à vis du monde extérieur ».
Les mineurs forment une grande famille ; la solidarité sans contre-partie est de rigueur face à l’adversité, une adversité qui ne manque pas : les coups de grisou, les horreurs de la guerre où chaque « femme du coron avait un frère, un père ou un mari au front », la faim, les terribles grèves, la grippe espagnole, la grande précarité, les expulsions manu militari, le despotisme de la Compagnie des mines, puis la terreur et l'oppression des Boches….
Mais les mineurs sont si soudés qu’il est impossible de sortir de sa condition, sous peine d’être traité de « vendus ! ». Madeleine aime la lecture où elle se réfugie ; elle aurait souhaité devenir « institutrice » mais « mon devoir était de rester auprès de mes parents, de les aider et non de chercher à m’élever au-dessus d’eux (…) j’étais imprégnée par le milieu dans lequel je vivais et inconsciemment j’en subissais l’influence ».
Bien que titulaire de son certificat d’études, Madeleine, sans réel choix, deviendra « couturière », comme sa mère.
Elle sait que certains petits garçons, moins chanceux, entre à la mine dès onze ou douze ans, « au criblage » pour trier le charbon ou comme galibot. « Dans une famille, dès qu’un garçon a quatorze ans, le garde des mines vient le recruter. Si le garçon refuse, la Compagnie licencie son père, ses frères, toute la famille si besoin est ». La famille doit alors quitter le coron...
Alors, sans jamais se plaindre, Madeleine suivra les traces de la plupart des femmes de mineurs : préparer les repas (et le briquet !), s’occuper des enfants et de la maison, laver (batteuse), repasser, coudre ; elle a « découvert très tôt la difficulté de rendre propres des vêtements incrustés de poussière de charbon. Les loques de fosse de mon père, le pantalon, la chemise, la blouse avec lesquels il travaillait, transformaient instantanément l’eau dans laquelle on les plongeait en une sorte d’encre noir intense ».
Très tôt également, elle dut apprendre à utiliser la machine à coudre : « la douleur qui irradiait le long de mon dos toujours courbé et de ma jambe droite, celle qui actionnait la pédale, me devint familière ».
Mais Madeleine ne rechigne jamais ; elle sait que son travail est moins pénible que celui du mineur de fond, « une vie basée sur un labeur incessant et la sueur quotidienne ».
Pourrait-elle envisager de vivre autre part, malgré tous les malheurs...« Je savais que ma souffrance était là, tapie comme une bête prête à bondir, et qu’elle allait me déchirer, me lacérer sans pitié »…
Pourrait-elle partir loin du coron et des gens qu’elle aimait, malgré la peur des mères quand dès quatorze ans les garçons descendent dans la mine, quand la sirène sonne à l’annonce d’un accident souvent meurtrier, et qu'au fond il y a des pères, des frères, des maris qui risquent tous les jours leur vie….. quant on ne connaît que ça….
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Tags : mineur, coron, Nord, Pas-de-Calais
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