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E comme Exode
Lorsque j’ai commencé mon arbre généalogique, il y a plus de dix ans, il m’a souvent été précisée que nos ancêtres, agriculteurs et artisans pour beaucoup, bougeaient peu hors de leur région d’origine. Que nenni ! Fin 18ème siècle, mes aïeux ont quitté leur Bavière natale pour s’installer en Alsace : Jean DEIBER, bavarois, a épousé Catherine RANSBACH orginaire de Heiligenberg, un petit village de la Vallée de la Bruche, tout comme Niederhaslach ou Oberhaslach.
Il est vrai que Bavarois et Alsaciens ont longtemps appartenu au même Empire germanique, avec une même entité politique, des mœurs communes et une langue qui pouvait favoriser les échanges entre les régions ; ils entretenaient des relations commerciales étroites et notamment dans le domaine de l’artisanat textile.
Difficile question que de répondre précisément au « pourquoi ont-ils tout quitté ? ». J’ai donc essayé de me plonger dans le contexte historique.
La première réponse qui s’est imposée comme une évidence est la guerre ; nous savons tous que les guerres sont souvent à l’origine de flux et reflux de populations déplacées. Qu’il s’agisse de la guerre de Succession d'Autriche (1740-1748) ou de la guerre de Sept Ans (1756-1763), ces deux conflits ont entraîné des destructions et des perturbations économiques incitant certaines familles Bavaroises à chercher des lieux plus stables et plus sûrs pour vivre.
Peut-être ont-ils été victimes de persécutions religieuses ; la famille Deiber a toujours été catholique et en Allemagne (Réforme puis Contre-Réforme) les courants religieux se sont souvent succédés avec violence, imposant à tour de rôle persécutions et restrictions.
Ou tout simplement, un besoin de changement….
Quel courage de quitter sa terre natale et de repartir à zéro...
Au 17ème siècle, Mathias Deiber (vers 1670) et Joseph (1703 – 1778) étaient installés à Waltenhofen, petit village au pied des Alpes bavaroises.
Comme la plupart de leurs ancêtres, Mathias et Joseph devaient vivre de leur agriculture en cultivant des céréales, des légumes, des fruits et en élevant du bétail, notamment des vaches, des moutons et des chèvres. Ils devaient également produire des produits artisanaux tels que textiles, poterie, qu’ils allaient vendre sur les marchés locaux. La vie devait être très rude dans les montagnes : l'exploitation forestière et le bois ont immanquablement complété une économie d’auto-suffisance pour un communauté montagnarde.
En 1735, Joseph épouse Marie Gerg, originaires de Oberau, un hameau encore plus pittoresque et reculé des montagnes bavaroises. Le couple part s’installer à Stein, puis dans le village Bräunlings (Immenstadt im Allgäu) situé à moins d’une lieue (1, 7 km environ) : il aura 10 enfants, tous nés en
Le chemin a dû être long et pénible, mais la famille a choisi la vallée de la Bruche pour déposer ses bagages ; la vie montagnarde y est aussi difficile qu’en Bavière.
Je les image aisément sur les bords du chemin, en charrette tirée par deux bœufs (ou bien des chevaux s’ils avaient pu se les offrir) longeant le lac Constance puis remontant le long du Rhin. Ou peut-être ont-ils emprunté les voies fluviales… Quoiqu’il en soit, le chemin de fer se verra le jour qu’au début du XIXème siècle, en 1804 pour la Compagnie du chemin de fer de Strasbourg à Bâle.
Tous leurs enfants sont restés en France, à Niederhaslach ; certains ont migré à Oberhaslach ; mais il faut croire qu'il fait bon vivre en Alsace puisque leur descendance s'y est installée ; mon ancêtre direct Jean a épousé Catherine et tout ce petit monde est resté en Alsace, au moins jusqu’en 1871. Un nouvel exode recommencera.
A Niederhaslach, le 7 janvier 1766, en 1ère noces, Jean s’est marié avec Anne-Marie RAEPPEL (1738-1773) dont il a eu 3 enfants :
- Joseph (1767-1826)
- Anne-Marie, décédée à 34 ans (1769-1803)
- Florent, décédé à 30 ans (1771-1801)
Au décès de son épouse Anne-Marie, Jean s’est rapidement uni à Catherine RANSBACH (1742-ca 1805) le 16 février 1773 ; il fallait bien trouver une seconde mère pour s’occuper des petits qui restaient, âgés respectivement de 6 ans, 4 ans et 2 ans. De cette union, sont nés :
- Nicolas, mon ancêtre direct (1774-1829)
- Élisabeth, décédée à 10 jours (1775-1775)
- Jean, décédé à 34 ans (1777-1811)
- Antoine, décédé à 36 ans (1779-1815)
- Marguerite, décédée à 18 mois (1782-1784)
- Catherine, décédée à 9 mois (1786-1787)
Jean mourra en 1800. A l’âge adulte, l’aîné de la fratrie, Nicolas, s’investira dans la vie du village ; c’est dire s’il appréciait la vie à Niederhaslach puisqu’il sera conseiller municipal.
Il faudra la guerre franco-prussienne et le traité de Francfort qui a suivi, pour que Émile, petit-fils de Nicolas et grand-père d’Henri s’exile à Reims en 1871 avec femme et enfants.
Si certains Alsaciens ont cherché à reconstruire leur vie dans un nouvel environnement, d’autres sont restés à vivre en tant que citoyens allemands. Pourquoi Émile est-il parti ? Se revendiquait-il « français » et avait-il le désir de rester fidèle à son identité et prouver ainsi sa loyauté envers la France ? Reims était déjà une ville importante connue pour son dynamisme économique, alors, pourquoi pas….
Emile n’avait peut-être pas grand-chose à perdre et quitter l'Alsace pour Reims lui offrait alors de nouvelles opportunités. Quoiqu’il en soit, tailleur, tailleur d’habits ou bien tisseur de père en fils, Émile s’est lancé dans la tannerie. On est toujours dans le textile me direz-vous ; au 18ème siècle, ses ancêtres bavarois travaillaient peut-être déjà dans la fabrication de textiles.
Théophille, le père d’Henri, suivra les traces d’Emile ; il sera « mégissier ».
Mais pour Henri, ce sera une autre aventure. Un peu plus courte que celle de ses pairs…..
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Pour en savoir plus :
Faire sa généalogie en Allemagne (Geneafinder)
Retrouver des ancêtres allemands (Geneanet)
Recherche généalogique en Allemagne (Geneawiki)
Tags : ancetre, bavarois, jean, deiber
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Commentaires
Article très intéressant. J'ai des ancêtres protestants qui viennent de Prusse et ont migré en Suisse.