• J comme Jeannette

    J comme JeannetteMarie Jeanne BEAUJON a épousé Henri DEIBER, mon grand-père paternel le 10 mars 1928, à Montreuil sous Bois. Pour moi, elle a toujours été « mémé Jeannette »….

    Je n’ai jamais vu ma grand-mère rire ; elle souriait quelquefois, mais elle était une femme sérieuse, grave, et je peux affirmer qu’elle n’a jamais été pleinement heureuse.

    « Jeannette » est née à Chissey en Morvan le 12 novembre 1903 ; elle est l’aînée d’une grande fratrie, affirmant qu’elle « a été commencé par l’un et finit par l’autre » lorsqu’elle évoquait son père. Elle n’avait aucune tendresse lorsqu’elle parlait de ce père « un peu buveur » et cette mère souvent absente.

    J comme Jeannette

    N’allez pas croire que j’écris le roman de Cosette ; Jeannette ne se plaignait jamais ; elle parlait peu d’elle ; elle appartenait à cette famille de cultivateurs morvandiaux qui ne perd pas de temps dans « la parlotte », pas de gémissement, pas de protestation ; il fallait travailler – et très tôt – si elle voulait assurer son repas chaque jour. Au début des années 1900, on ne nourrissait pas les bouches inutiles. La vie à la campagne était rude ; personne n’était épargnée ; si l’on voulait survivre, il ne fallait pas ménager sa peine : travailler, c’est ce que Jeannette a fait toute sa vie.

    J comme Jeannette

    Pour que ses parents s’investissent sur un emploi durable, hors de la Saône et Loire, ses grands-parents l’ont gardé à Gouloux, dans la Nièvre. Elle devait fabriquer des petits paniers en osier pour ensuite les vendre sur le marché ; Son grand-père était sabotier et sa grand-mère – dont elle portait le prénom – s’occupait des onze enfants du couple.

    Elle a très peu connu les bancs de la classe ; elle a appris à lire et écrire avec mon père, lorsqu’il faisait ses devoirs. Jeannette a grandi comme elle pouvait…J comme Jeannette

    Elle n’était pas une femme d’intérieur mais sa maison était propre, sans fioriture ni excès : pas de jolie nappe sur la table, pas de beaux rideaux aux fenêtres ; Jeannette ne voulait que du fonctionnel ; je pense qu’elle s’était beaucoup trop occupée de ses petits frères et sœurs ; elle n’avait plus de place pour les bisous et les câlins….

    Jeannette était pas coquette ; petite mais bien charpentée, elle n’appréciait que le « pratique » et ne laissait aucune place pour les simagrées Je ne lui ai connu ni bijoux, ni rubans, ni robe élégante. Et surtout pas de pantalon, qu’elle nommait d’ailleurs « une culotte ».

    Jeannette aux fourneaux, Jeannette au ménage, elle n'était pas non plus une « grand-mère gâteaux ». Elle était connue et respectée pour son franc-parler et sa droiture. Et lorsque Jeannette disait quelque chose, on ne pouvait tergiverser. « Mémé Jeannette » correspondait pour moi à la femme moderne, totalement indépendante.

    Je sais qu’elle aimait beaucoup mon grand-père, qu’elle s’est dévouée corps et âme pour lui ; elle s’est arrangée de ses idées, acceptant ses absences pour des meetings politiques. Jeannette s’est souvent retrouvée seule, jonglant entre ses deux emplois (travail à l’usine et ménages chez des particuliers) tout en s’occupant de ses deux enfants, Roland et Yolande.J comme Jeannette

    En ce temps-là, il n’y avait pas de place pour le farniente. D’ailleurs, Jeannette n’a goûté les loisirs qu’au moment de sa retraite bien méritée. Pourtant, elle est restée une femme très active : elle s’est investie bénévolement dans toutes les manifestations d’Anciens Combattants et de Veuves de guerre, notamment en qualité de « porte-drapeau » ; elle était également la trésorière de l’Association du Foyer des « Anciens au Square Marcel Cachin » à Montreuil.

    « Mémé Jeannette »... je me souviens uniquement des rares jeux de cartes que nous faisons ensemble ; je me souviens d’elle comme d’une femme laborieuse, consciencieuse dans son travail quotidien, fidèle aux attentes sociales de cette époque qui valorisait la persévérance et la discipline d’une épouse dévouée. Je la revois encore partir, le seau à la main, chercher le charbon au cabanon, dans le fond du jardin.

    Les années de bonheur ont été courtes… Jeannette ne restait jamais bien longtemps dans sa demeure, comme pour fuir un passé insupportable ; après ses corvées domestiques, elle s’empressait de sortir : travail, courses, maison, bénévolat. Comme si elle voulait fuir un lieu trop chargé du souvenir de son défunt mari… Et quelle place restait-il pour les enfants ?

    Serait une explication au mariage précoce de mon père ?

    J comme Jeannette

    « I comme IntuitionK comme....? ... vos blogs »
    Pin It

    Tags Tags : , ,
  • Commentaires

    1
    Jeudi 30 Novembre 2023 à 09:45

    Très belle présentation de votre grand-mère, 

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :